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L’ARS et l’instruction en famille

Traditionnellement, les familles pratiquant l’instruction en famille de leurs enfants ne sont pas destinataires de l’Allocation de Rentrée Scolaire (IEF).

En effet, cela découle d’une lecture stricte de l’administration des dispositions de l’article l. 543-1 du code de la sécurité sociale qui dispose que :

« Une allocation de rentrée scolaire est attribuée au ménage ou à la personne dont les ressources ne dépassent pas un plafond variable en fonction du nombre des enfants à charge, pour chaque enfant qui, ayant atteint un âge déterminé, est inscrit dans un établissement ou organisme d’enseignement public ou privé, jusqu’à la fin de l’obligation scolaire.

[…] ».

Sur la base de la précision en fin de premier alinéa, l’administration considère donc que le texte exclu l’instruction en famille du fait de l’exigence d’être inscrit dans un établissement public ou privé.

Toutefois, un organisme d’enseignement et un établissement d’enseignement sont deux choses distinctes ; le premier désigne toute structure exerçant dans le cadre du droit de l’éducation alors que le second désigne les établissements scolaires (publics ou privés).

Or, les organismes, notamment à distance, ne peuvent en aucun cas délivrer des certificats de scolarité ; leurs élèves ne sont donc pas considérés comme scolarisés. Ils agissent d’ailleurs le plus souvent via l’enseignement à distance – là encore, distinct de l’établissement d’enseignement – au soutien de famille en instruction en famille.

Dès lors, comment interpréter ces dispositions qui semblent restreindre aux enfants scolariser l’allocation de rentrée scolaire ? Ce, d’autant plus que l’article R. 543-4 du même code dispose que :

« La condition d’inscription prévue au premier alinéa de l’article L. 543-1 est, sauf preuve contraire, présumée remplie pour chacun des enfants ouvrant droit à l’allocation de rentrée scolaire.

Dans le cas où le versement des prestations familiales a été supprimé, au titre de l’année scolaire précédente, en application des dispositions qui édictent des sanctions aux manquements à l’obligation scolaire, l’allocation de rentrée scolaire ne doit être versée que sur justification de l’inscription de l’enfant intéressé pour la nouvelle année scolaire dans un établissement ou organisme d’enseignement ».

 

Une décision du Tribunal judiciaire d’Evreux est intervenue il y a deux ans et donne des enseignements intéressants à ce égard alors que les texte semblent clairement lier inscription et allocation.

Ce dernier à considéré que la famille, instruisant elle-même ses enfants, était fondée à solliciter le versement de l’ARS au titre de l’instruction de ses enfants.

Après avoir visé l’article L. 543-1 reproduit supra, il s’est appuyé sur l’article R. 543-3 du même code qui prévoit que « Est, au sens et pour l’application du premier alinéa de l’article L. 543-1, un établissement ou organisme d’enseignement public ou privé tout établissement ou organisme qui a pour objet de dispenser un enseignement permettant aux enfants qui suivent cet enseignement de satisfaire à l’obligation scolaire ».

Ainsi, ce n’est pas la structure qui conditionne l’ouverture des droits mais l’objet final de l’établissement ou de l’organisme, lequel doit tendre à la dispense d’une instruction conforme aux attendus légaux.

Elle considère à ce titre la famille comme un organisme dispensant une instruction conforme aux attendus légaux en retenant que :

« Cependant, les enfants X. sont dument autorisés à être instruits en famille, et leur enseignement définis, organisé et contrôlé par l’Education Nationale, ainsi que la famille en justifie, l’Education Nationale délivrant même des certificats de scolarité. Il résulte bien que X. et Y. sont scolarisés au sein d’un organisme, la famille, émanant de l’Education Nationale qui délivre les programmes et assure le contrôle des connaissances, dispensant par l’intermédiaire de la famille un enseignement permettant aux enfants qui suivent cet enseignement de satisfaire à l’obligation scolaire »(TJ Evreux, 16 mars 2023, n° 22/00423).

 

La décision retient donc le droit de la famille à percevoir l’ARS du fait d’une autorisation d’instruction en famille.

La décision est inédite sur la question, le contentieux de l’ARS étant presque inexistant. Si la considération de la famille comme un organisme peut paraître quelque peu audacieuse, d’autres arguments pouvaient sous-tendre la décision puisqu’hormis les deux mentions mises en exergue, rien ne paraît exclure les enfants instruits en famille du bénéfice de l’ARS.

Si vous rencontrez une difficulté liée au droit de l’Education, n’hésitez pas à consulter nos avocats.