
Organismes de formation sanctionnés : le juge veille au respect du contradictoire
La procédure du contradictoire, essentielle en droit administratif, vise à garantir à toute personne concernée la possibilité de présenter ses observations avant toute décision susceptible de porter atteinte à ses droits.
Cette procédure, préalable nécessaire, aux sanctions prises par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) à l’encontre des organismes de formation est au cœur des récentes décisions du tribunal administratif de Paris (TA de Paris, 3e chambre, 17 décembre 2024, n° 2324422) et du Tribunal administratif de Nîmes (TA de Nîmes, 1re ch., 3 déc. 2024, n° 2202029). Ces affaires portaient en particulier sur le respect de la procédure contradictoire dans l’application des sanctions liées à la plateforme « mon compte formation ».
L’article R. 6333-6 du Code du travail permet à la Caisse des Dépôts de prendre plusieurs mesures à l’encontre d’un organisme de formation en cas de manquement à ses obligations, telles que le non-respect des critères d’éligibilité pour le financement des formations. Parmi ces mesures figurent :
- La suspension temporaire du référencement de l’organisme sur la plateforme « Mon compte formation » ;
- Le refus de paiement des prestations ;
- Le remboursement des sommes indûment versées.
Cependant, comme le rappelle le tribunal administratif, la CDC doit respecter une procédure contradictoire, détaillée dans les conditions générales d’utilisation de la plateforme. Cette procédure se compose de plusieurs étapes clés : l’envoi d’une lettre d’observations à l’organisme de formation, une période d’échange pendant laquelle l’organisme peut présenter ses observations, et enfin, la notification de la décision de sanction. Cette procédure peut être accompagnée de mesures conservatoires, telles que la suspension temporaire du référencement ou des paiements.
Le prononcer de mesures de sauvegardes ne portent pas atteinte à la procédure du contradictoire :
Dans l’affaire jugée par le tribunal administratif de Nîmes, un organisme de formation a été informé par la CDC de l’ouverture d’une procédure contradictoire en raison d’irrégularités relevées dans ses offres de formation. Au cours de cette procédure, la société a vu son référencement suspendu. Par la suite, la société s’est vu sanctionnée.
Le tribunal précise qu’il est possible, au cours de la procédure contradictoire, de prendre des mesures conservatoires. En l’occurrence, la suspension du référencement de l’organisme pendant cette procédure ne constitue pas une violation des règles du contradictoire.
Pour être valide, la lettre d’observation doit informer l’organisme des irrégularités constatées et des conséquences possibles :
Dans la seconde affaire, un organisme de formation a reçu une lettre d’observations de la CDC lui demandant de justifier un taux de réalisation de 1% pour une action de formation. L’organisme a fourni des observations, mais la CDC a jugé les justificatifs insuffisants, entraînant la décision de ne pas rémunérer l’action de formation et d’exiger le remboursement des sommes déjà versées.
Le tribunal a estimé que la procédure contradictoire était irrégulière. En effet, la lettre d’observation de la CDC n’informait pas suffisamment l’organisme sur la possibilité de sanctions en cas de réponse insatisfaisante. De plus, elle ne précisait ni la nature des sanctions envisagées, ni leur base juridique, ce qui a rendu la procédure irrégulière.
Tribunal administratif de Paris, 3e section – 3e chambre, 17 décembre 2024, n° 2324422 / TA Nîmes, 1re ch., 3 déc. 2024, n° 2202029.