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Sur la saisine préventive du juge en matière de campagne électoral

Dans une décision rendue l’année dernière, le juge administratif a eu l’occasion de rappeler un point méconnu du contentieux électoral, à savoir, la saisine préventive de la juridiction.

En effet, classiquement, les actes de propagandes électorales n’étant pas détachables du résultat de l’élection, les manœuvres électorales sont sanctionnées lors du recours à la suite de la proclamation des résultats.

Cependant, les recours au fond en matière électoral se heurtent souvent à l’exigence de démonter l’altération de la sincérité du scrutin par les manœuvres litigieuses. Il peut donc être difficile de faire véritablement sanctionner des manœuvres en ce sens.

Pourtant, il existe une possibilité d’agir en amont, y compris devant un juge normalement incompétent.

En effet, en matière d’élection, une répartition des compétences existences. Les élections municipales sont du ressort des tribunaux administratifs et les élections nationales du Conseil Constitutionnel.

En l’espèce, le tribunal rappelle que quand bien même le juge de l’élection est le juge constitutionnel, le juge administratif peut intervenir, en urgence, en amont de l’élection.

Il a ainsi rappelé que :

« 1. En principe, la critique des documents de propagande ou de vote n’est pas détachable du contentieux des opérations électorales. Une contestation à leur sujet ne peut donc être formulée qu’après le scrutin, devant le juge de l’élection. Toutefois, le juge des référés peut, avant le scrutin, faire usage des pouvoirs qu’il tient de l’article L. 521-2 du code de justice administrative dans le cas où, en raison de circonstances particulières, apparaîtrait une illégalité grave et manifeste de nature à affecter la sincérité du vote » (TA Cergy-Pontoise, 27 juin 2024, n° 2409271).

Ainsi que cela ressort du considérant cité, la procédure permettant d’agir utilement en amont des opérations électorales est celle du référé-liberté, où l’urgence s’apprécie très strictement. Précisons que le considérant n’est pas nouveau puisque c’est le Conseil d’Etat qui l’a posé en 2021. Toutefois, il s’agissait de la première application positive d’espèce.

En l’espèce, le tribunal a considéré qu’eu égard à la courte campagne des élections législatives en juin dernier, l’urgence était nécessairement établie.

Sur le fond, le juge retient que l’apposition d’un logo, en guise de soutien, à des candidats non-reconnus par le parti dont le logo est emprunté sur leurs affiches de campagne « caractérisent une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de suffrage garantie à l’article 3 de la Constitution de nature à affecter la sincérité du vote et justifiant que le juge des référés fasse usage, avant le scrutin, de pouvoirs qu’il tient de l’article ».

Il enjoint donc aux communes concernées de faire procéder à l’occultation du logo litigieux de toutes les affiches présentes sur les emplacements réservés sans délais, afin de préserver la sincérité du scrutin.

Cette décision est donc une première mise en application de la liberté fondamentale du suffrage, fondée sur l’article 3 de notre Constitution.

En cas de difficulté rencontrée en droit électoral, n’hésitez pas à prendre rendez-vous avec nos avocats.