
Grille d’analyse de la situation propre proposée par le rapporteur public (Poitiers)
Lors de l’audience du 13 mars tenue par le Tribunal administratif de Poitiers, Mme le rapporteur public a proposé une tentative de grille d’analyse du motif 4 de l’article L. 131-5 du code de l’éducation.
Pour mémoire, ce dernier permet l’obtention d’une autorisation d’instruire son enfant en famille sous réserve de justifier d’une situation propre motivant le projet éducatif.
Cependant, cette expression, ouverte à beaucoup d’interprétation, n’est clairement définie par aucun texte, ni aucune jurisprudence établie.
Lors de l’audience qui concernait une dizaine de familles pratiquant l’instruction en famille, Mme le rapporteur public a plutôt retenu la thèse du Ministère de l’Education nationale, laquelle consiste à considérer que ce motif implique de justifier d’une situation spécifique.
Au soutien de ses conclusions, elle a fait l’effort de proposer une grille d’analyse de ce motif, qui reste unique à ce jour.
Selon elle, pour apprécier l’existence d’une situation propre, le Rectorat doit effectuer une analyse reposant sur 4 critères : historique, fratrie, spécificité de l’enfant, qualité de l’instruction projetée.
Sur l’historique, le Rectorat serait censé regarder l’ancienneté de l’enfant en instruction en famille. Ce critère implique donc une sorte de prime au sortant et serait dévastateur pour tous les nouveaux entrants en instruction en famille.
La fratrie, si elle permettrait de « sauver » les nouveaux entrants disposant d’ainés pratiquant l’instruction en famille, serait elle aussi un obstacle sérieux pour les familles dont les enfants ne suivent pas le même mode d’instruction ou sont enfant unique.
Les spécificités propres à l’enfant sont les éléments de situation propre à l’exclusion de ceux recouverts par les deux premiers critères. Spécifique restant proches de particulier, il convient là encore de se méfier.
La qualité du projet d’instruction reste en revanche un critère incontournable dans la mesure où il pèse nécessairement dans la balance des intérêts permettant de déterminer l’octroi, ou le refus, de l’autorisation d’instruction en famille.
On le voit, la grille d’analyse proposée n’est pas libérale envers les familles et tend à restreindre les autorisations fondées sur la situation propre à l’enfant.
Naturellement, nous avons combattu cette approche qui nous semble à la fois trop stricte et inégalitaire puisque les primo entrants enfant unique se retrouveraient alors dépourvus de toutes chances d’obtenir l’autorisation, sauf à disposer de particularités.
En outre, dans une approche conforme à l’intérêt supérieur de l’enfant, il nous apparaît essentiel de valoriser, pour l’essentiel de l’approche de la situation, le projet éducatif et sa qualité. Après tout, c’est bien la qualité de l’instruction qui permet de faire pencher la balance d’intérêt que le Rectorat doit réaliser.