
Jurisprudences en matière funéraire : analyse de décisions récentes
Le contentieux funéraire donne lieu à des décisions judiciaires qui, au-delà de leur dimension familiale souvent douloureuse, précisent les règles applicables en matière d’organisation des obsèques, de destination des cendres et de respect de la volonté du défunt. Nous vous proposons une analyse de quelques jurisprudences récentes.
1. L’incinération contre l’avis d’une partie de la famille
Madame X née en 1936, est décédée le 23 décembre 2024. Parmi ses sept enfants, quatre souhaitaient qu’elle soit incinérée conformément à sa volonté exprimée, tandis que trois autres s’y opposaient au motif qu’elle était une fervente catholique et que la crémation ne correspondait pas à sa foi.
Le tribunal a désigné Madame DM pour organiser les funérailles, autorisant l’incinération de la défunte et le dépôt des cendres dans le caveau familial.
Le tribunal s’est fondé sur :
- Les témoignages de deux nièces de la défunte, très proches d’elle, attestant qu’elle avait clairement exprimé son désir d’être incinérée
- La désignation de Madame DM comme personne de confiance, traduisant un lien particulier
- L’absence d’incompatibilité entre la crémation et la foi catholique, l’Église reconnaissant cette possibilité sous certaines conditions
- Le fait que l’incinération ne contredisait pas le souhait d’être enterrée avec son mari, l’urne funéraire pouvant être disposée à ses côtés
Cette décision illustre plusieurs principes importants :
- La valeur probante des témoignages : même sans testament, des attestations de proches peuvent établir la volonté du défunt
- La personne de confiance comme indice : si cette désignation ne s’étend pas aux dernières volontés, elle révèle néanmoins la proximité particulière
- L’interprétation large de la volonté : le fait que certains membres de la famille n’aient pas reçu l’information n’exclut pas qu’elle ait pu clairement manifester ses intentions auprès d’autres personnes
- La compatibilité foi/incinération : le tribunal rejette l’argument religieux sans s’ériger en autorité théologique
Décision commentée: TJ Chartres, 31 décembre 2024, n° 24/03636
2. Le conflit sur la destination des cendres
Monsieur [L] [O] est décédé en 2024. Sa mère et ses frères et sœur souhaitaient que ses cendres soient déposées au columbarium où repose son père. Son épouse, Madame [Y] [B] veuve [O], demandait quant à elle le dépôt au cimetière où le couple vivait.
Le tribunal a débouté les demandeurs (la mère et la fratrie) et ordonné le dépôt de l’urne funéraire au cimetière, autorisant Madame [B] veuve [O] à y procéder.
Le tribunal a privilégié les attestations produites par l’épouse, jugées :
- Plus détaillées et circonstanciées que celles de la famille d’origine
- Révélant une volonté du défunt exprimée postérieurement à celle évoquée par sa famille d’origine (notamment lors d’un repas à Pâques 2024)
- Cohérentes avec la vie du couple : le défunt et son épouse s’étaient mariés en 2012, vivaient ensemble où ils avaient acquis un bien en 2005
Le tribunal a souligné que la volonté d’une personne pouvant évoluer au cours de sa vie, le juge doit rechercher sa volonté au jour de son décès.
Cette décision est intéressante en ce qu’elle précise les points suivants:
- La hiérarchie temporelle des volontés : en cas de volontés contradictoires exprimées à différentes périodes, c’est la plus récente qui prévaut
- Le degré de précision des attestations : les témoignages doivent être circonstanciés pour emporter la conviction du juge
- Le contexte de vie du défunt : le tribunal prend en compte le lieu de résidence effective, les liens conjugaux, la propriété immobilière
- L’épouse face à la famille d’origine : le lien conjugal et la communauté de vie peuvent prévaloir sur les liens filiaux
Décision commentée: TJ Metz, 17 octobre 2024, n° 24/02349
3. L’exhumation et le respect de la volonté initiale
M. X décédé en 2023 à 34 ans, a été inhumé provisoirement dans le caveau familial de sa belle-mère en attendant la construction du caveau de ses parents. Ces derniers demandaient son exhumation et son transfert dans ce caveau désormais construit. Sa concubine depuis 10 ans s’y opposait, invoquant la dégradation de ses relations avec les parents après les obsèques.
Le tribunal a désigné la mère, comme la personne la mieux qualifiée pour décider des modalités des funérailles et a autorisé l’exhumation en vue de l’inhumation dans le caveau familial des parents.
Le tribunal a constaté que :
- L’ensemble des parties s’était accordé pour que M. X soit inhumé dans le caveau de ses parents
- Dans l’attente de sa construction, il avait été provisoirement inhumé dans le caveau de la belle-mère
- La sépulture actuelle présentait donc un caractère provisoire
- L’accord initial révélait la volonté du défunt comme étant celle la plus proche de son décès
- Les craintes de la concubine quant à l’avenir ne suffisaient pas à remettre en cause cette volonté
Cette décision est intéressante quant aux points suivants:
- La force de l’accord initial : lorsque toutes les parties se sont entendues immédiatement après le décès, cet accord reflète la volonté présumée du défunt
- Le caractère provisoire de la sépulture : il peut être établi par les circonstances (attente de construction)
- L’irrévocabilité relative : une fois le décès survenu, seuls des motifs graves peuvent justifier une remise en cause
- Les considérations futures ne sont pas déterminantes : les craintes sur ce qui pourrait advenir ne constituent pas un motif suffisant
Décision commentée: TJ Paris, 8 janvier 2025, n° 23/12693
4. La nature de la concession funéraire
Monsieur B souhaitait faire déposer l’urne de son épouse dans le caveau où sont enterrés les parents et la sœur de celle-ci. Le maire de Saint-Riquier-Es-Plains a refusé au motif que la concession, accordée aux époux I en 2001, était une « sépulture particulière » et non une « sépulture de famille ».
La Cour administrative d’appel a confirmé le refus du maire, considérant que la concession ne pouvait être qualifiée de familiale.
La Cour a relevé que :
- L’acte de concession du 12 juillet 2001 mentionnait expressément « la sépulture particulière » des époux I, la mention « sépulture de la famille » ayant été barrée
- Aucun document écrit n’établissait que les titulaires avaient modifié la destination de la concession
- L’inhumation ultérieure de la mère et de la sœur de Monsieur I, autorisée en 2001, ne caractérisait pas à elle seule une modification de la nature de la concession
- Les attestations produites, rédigées 18 ans après la signature de l’acte, n’établissaient pas la volonté initiale
L’intérêt jurisprudentiel est le suivant:
- La qualification contractuelle prime : c’est l’acte de concession qui détermine sa nature (particulière ou familiale)
- La modification doit être formalisée : une concession particulière ne devient pas familiale par le simple usage
- Les pouvoirs du maire : il doit veiller à ce qu’une personne ne soit pas inhumée dans une concession sans l’accord du titulaire
- La consultation d’autorités extérieures : le maire peut solliciter l’avis du procureur sans que cela entache sa décision d’illégalité
- La limite de la preuve testimoniale : des attestations tardives ne suffisent pas à établir une volonté initiale différente
Décision commentée: CAA Douai, 20 novembre 2024, n° 22DA01772
5. Le rapatriement international d’un corps
Monsieur X de nationalité gabonaise, est décédé à Paris en 2024. Sa mère, résidant en France depuis trois ans, souhaitait organiser les funérailles en France. Son père, vivant au Gabon, demandait le rapatriement du corps au Gabon.
Le tribunal a désigné le père comme la personne la mieux qualifiée pour organiser les funérailles et a autorisé le transport du corps vers le Gabon pour y être inhumé.
Le tribunal a considéré que :
- Le défunt était de nationalité gabonaise et vivait au Gabon
- Sa compagne et l’enfant qu’il avait avec elle se trouvaient au Gabon
- Le centre de ses intérêts se situait clairement sur la terre gabonaise
- Seul le père avait manifesté le souci d’organiser le rapatriement conforme à ce centre d’intérêts
- La mère s’était renseignée sur un enterrement en France sans explication cohérente avec la vie du défunt
- Un message du défunt évoquait son père en ces termes : « même mon propre père », révélant l’importance de ce lien
Cette dérision est intéressante sur les points suivants:
- Le centre des intérêts du défunt : critère déterminant pour présumer sa volonté en l’absence d’expression formelle
- La nationalité et le lieu de vie habituel : éléments essentiels d’appréciation
- Les liens familiaux significatifs (compagne, enfant) pèsent dans l’analyse
- Les écrits du défunt, même informels (messages), peuvent révéler ses attachements
- Le parent le plus en accord avec la volonté présumée : peu importe la qualité des relations personnelles si l’un des parents propose une solution manifestement plus cohérente avec la vie du défunt
Décision commentée: TJ Paris, 9 octobre 2024, n° 24/05416
6. La suspension d’habilitation funéraire
La SARL Pompes funèbres U Ponte Leccia a vu son habilitation suspendue pour un an après qu’une enquête de gendarmerie a établi que son gérant avait procédé à l’ouverture et l’exhumation, hors la présence du maire, de sept cercueils, réuni les cercueils en un seul, et dissimulé les restes humains ne pouvant être contenus dans un seul cercueil dans des sacs abandonnés dans le maquis.
Le Tribunal administratif a rejeté le recours et confirmé la suspension de l’habilitation.
Le tribunal a retenu :
- Les faits établis par le rapport de gendarmerie n’étaient pas sérieusement contestés
- Le gérant avait été aidé par un employé dont les qualifications requises pour exercer une activité funéraire n’étaient pas justifiées
- Le véhicule de la société avait été utilisé pour transporter les sacs et cercueils
- La condamnation pénale du gérant (6 mois avec sursis pour atteinte à l’intégrité d’un cadavre) confirmait la gravité des faits
- La procédure contradictoire avait été respectée, même si formellement imparfaite
Cette décision mérite notre attention en raison des points suivants:
- Le régime de l’habilitation funéraire : elle peut être suspendue pour atteinte à l’ordre public ou non-respect du code général des collectivités territoriales
- La responsabilité du dirigeant : il ne peut se défausser sur ses employés
- L’obligation de qualification : les employés accomplissant des actes funéraires doivent disposer des formations requises
- Le respect dû aux morts : critère fondamental de la police funéraire
- La procédure contradictoire : même une imperfection formelle (date erronée dans le courrier) n’invalide pas la procédure si l’intéressé a pu présenter ses observations
Décision commentée: TA Bastia, 28 janvier 2025, n° 2200948
7. Le devoir d’information de l’entreprise funéraire
Monsieur X, résidant en Allemagne, a confié l’organisation des obsèques de sa tante, décédée en 2019 dans un EHPAD, à la société Cap Santé. Après la crémation, il a découvert que le corps avait été incinéré avec des bagues de valeur sans qu’il ait été averti.
La Cour d’appel a infirmé le jugement qui avait débouté Monsieur X et a condamné la société Cap Santé à lui verser 6 000 € de dommages-intérêts au titre de la perte de chance d’avoir donné instruction de retirer les bagues.
La Cour a considéré que :
- L’entreprise funéraire, professionnelle, était tenue d’un devoir d’information et de conseil envers son client
- Ce devoir était renforcé par le fait que le client n’était pas sur place (résidant en Allemagne)
- La société aurait dû se renseigner auprès de l’EHPAD sur la présence de bijoux et en informer le client
- Elle aurait dû l’informer qu’il lui appartenait de donner des instructions pour faire retirer les bijoux avant la mise en bière
- Le manquement à ce devoir constituait une faute contractuelle
- Le préjudice consistait en la perte de chance d’avoir pu donner cette instruction
La Cour a toutefois limité l’indemnisation à 6 000 € (sur 15 925 € demandés) au motif que :
- Le préjudice était une perte de chance et non un préjudice certain
- L’évaluation produite portait sur plus de bijoux que ceux dont la présence était attestée
- Rien ne prouvait que le client aurait souhaité récupérer l’alliance
L’apport jurisprudentiel
- Le devoir d’information et de conseil de l’opérateur funéraire : obligation professionnelle spécifique
- Le renforcement en cas de distance : le devoir est accru lorsque le client ne peut être présent
- L’obligation de se renseigner : l’entreprise doit prendre l’initiative de vérifier auprès de l’établissement de santé
- La perte de chance : notion applicable même en matière funéraire, permettant une indemnisation partielle
- L’évaluation du préjudice : elle doit être cohérente avec les éléments de preuve et le degré de certitude de la perte
Décision commentée: CA Rennes, 19 janvier 2024, n° 21/03658
8. Les pratiques anticoncurrentielles en matière funéraire
Deux sociétés exerçant des activités de pompes funèbres et de marbrerie dans le secteur d’Albi reprochaient à leurs concurrentes des pratiques anticoncurrentielles (abus de position dominante, entente de partage de marché), sur la base d’un rapport de la DIRECCTE de 2014 et de transactions administratives de 2016.
La Cour d’appel a infirmé le jugement qui avait condamné les défenderesses solidairement à payer 156 180 € et a rejeté l’ensemble des demandes.
La Cour a considéré que :
- Les pratiques anticoncurrentielles devaient être établies selon le droit commun de la responsabilité (faute, préjudice, lien de causalité) car antérieures à la transposition de la directive de 2014
- Le rapport de la DIRECCTE était nuancé et soulignait l’impact limité des pratiques alléguées
- Le rapport d’expertise privé produit était unilatéral et ne pouvait fonder la décision sans autres éléments de preuve
- Ce rapport présentait des failles méthodologiques (données non comparables, absence de données pour la période pertinente)
- Les demandeurs n’apportaient pas la preuve d’un préjudice certain
L’apport jurisprudentiel
- La charge de la preuve : en l’absence de présomption légale, la victime doit démontrer la faute, le préjudice et le lien de causalité
- La valeur du rapport administratif : il peut établir une faute mais ne prouve pas automatiquement un préjudice
- L’expertise unilatérale : elle ne peut fonder une décision qu’appuyée par d’autres éléments probants
- La rigueur méthodologique : l’évaluation du préjudice doit reposer sur des données comparables et pertinentes
- Le secteur funéraire et la concurrence : comme tout secteur économique, il est soumis au droit de la concurrence
Décision commentée: CA Paris, 15 mai 2024, n° 22/07737
9. Le transfert d’urnes et les divisions familiales
Des époux avaient acquis en 1994 une concession au cimetière. Monsieur y a été inhumé en 2007, puis Madame en 2018. En 2019, l’un des fils a acquis une nouvelle concession et demandait le transfert des urnes pour réaliser le projet paternel d’édifier un caveau. Deux frères s’y opposaient.
La Cour d’appel a confirmé le jugement autorisant le transfert des urnes dans le nouveau caveau.
La Cour a retenu :
- L’attestation des Pompes Funèbres établissait que le père avait la volonté de faire construire un caveau
- La concession de 1994 pour 15 ans et l’absence de caveau accréditaient la thèse d’une sépulture provisoire
- Après 61 années de mariage et 7 enfants, l’épouse aurait souhaité que ses cendres soient conservées auprès de celles de son conjoint
- Les appelants ne prouvaient pas que les cendres seraient « traitées indignement »
- Le fait qu’ils n’aient appris le transfert qu’en octobre 2022 (par un tiers) alors qu’il avait eu lieu en janvier 2021 démontrait qu’ils ne se rendaient pas eux-mêmes sur les sépultures, relativisant leur préjudice moral
L’apport jurisprudentiel
- La preuve du projet du défunt : des attestations de professionnels peuvent l’établir même sans devis signé
- La durée de la concession : critère d’appréciation du caractère définitif ou provisoire
- La présomption de concordance des volontés des époux : après de longues années de mariage
- L’absence de recueillement effectif : élément décrédibilisant l’invocation d’un préjudice
- La rectification d’erreur matérielle : la Cour peut réparer une omission du dispositif du jugement
Décision commentée: CA Bordeaux, 23 janvier 2024, n° 21/00151
10. L’irrévocabilité de la volonté après le décès
Monsieur B et Madame G avaient acquis en 1994 une concession perpétuelle. Monsieur B y a été enterré en 2007. En 2021, Madame G a demandé son exhumation pour le transférer là où elle vivait désormais. Trois des onze enfants s’y opposaient.
La Cour d’appel a infirmé le jugement qui avait autorisé le transfert et a débouté les demandeurs de leur demande d’exhumation.
La Cour a considéré que :
- L’acquisition de la concession perpétuelle en 1994 et la réalisation d’un monument en 1995 exprimaient clairement la volonté du défunt
- Il n’a jamais manifesté de son vivant la volonté de remettre en cause ce contrat
- L’inhumation en 2007 décidée par sa veuve, confirmait cette volonté
- Pendant 14 ans, la veuve n’a jamais contesté cette inhumation
- Le changement de volonté de l’épouse quant à son propre lieu de sépulture ne peut remettre en cause la volonté du mari clairement exprimée de son vivant
- Cette disposition était devenue irrévocable à son décès en 2007
L’apport jurisprudentiel
- L’irrévocabilité post-mortem : la volonté du défunt ne peut plus être modifiée après son décès
- La distinction entre volonté du survivant et volonté du défunt : le conjoint survivant ne peut imposer sa propre volonté contre celle, antérieure, du défunt
- La valeur de l’acte de concession : il constitue une expression formelle de volonté
- L’écoulement du temps : 14 ans sans contestation confortent la volonté initiale
- La question préjudicielle inutile : lorsque la demande principale est rejetée, les questions accessoires deviennent sans objet
Décision commentée: CA Nîmes, 7 mars 2024, n° 23/02392
11. La propriété de l’urne vide
Après le décès de leur fils X et sa crémation, les parents étaient en désaccord sur le sort de l’urne cinéraire une fois les cendres dispersées. La mère, propriétaire de l’urne, en demandait la restitution. Le père souhaitait qu’elle soit déposée dans une concession.
La Cour d’appel a infirmé le jugement et a ordonné la restitution de l’urne à la mère une fois les cendres dispersées.
La Cour a considéré que :
- L’article 16-1 du code civil, relatif au corps humain, ne s’applique pas aux biens meubles mais uniquement aux éléments du corps humain
- Une fois les cendres dispersées, l’urne constitue un bien meuble dont la propriété est régie par l’article 544 du code civil
- La mère justifiait de son droit de propriété par la facture établie à son nom
- Les cendres n’étaient jamais entrées en contact direct avec l’urne (présence d’une poche)
- Le respect dû aux restes ne s’oppose pas à la restitution une fois les cendres dispersées
L’apport jurisprudentiel
- La distinction entre cendres et contenant : les cendres relèvent du régime protecteur de l’article 16-1-1, l’urne vide du droit commun des biens
- Le moment déterminant : c’est après la dispersion des cendres que l’urne redevient un simple bien meuble
- Le droit de propriété du payeur : la facture établit la propriété du bien
- L’absence de contact direct : renforce la qualification de simple contenant
- Le code général des collectivités territoriales ne règle pas tout : il ne contient aucune disposition sur le sort de l’urne après dispersion
Décision commentée: CA Rouen, 11 décembre 2019, n° 19/02100
12. La responsabilité pour urne défectueuse
Madame Y avait confié l’organisation des funérailles de son mari à la société SFVP. Lors de la reprise des cendres, elle a constaté que l’intérieur de l’urne était oxydé. Elle demandait le remboursement de l’intégralité des frais funéraires (3 268 €) et des dommages-intérêts.
La Cour d’appel a confirmé le jugement qui avait rejeté la résolution du contrat mais accordé des dommages-intérêts de 213,13 € (prix de l’urne) et 600 € pour préjudice moral.
La Cour a considéré que :
- Les cendres ne sont pas entreposées directement dans l’urne mais dans un sac ignifugé, donc elles n’ont pas été souillées
- La société avait proposé le remplacement de l’urne, refusé par la cliente
- Le défaut de l’urne ne justifie pas la résolution du contrat portant sur l’intégralité des funérailles (cercueil, convoi, cérémonie, incinération, etc.)
- Seuls des dommages-intérêts sont dus pour inexécution partielle
- Le préjudice matériel correspond au prix de l’urne défectueuse
- Le préjudice moral résulte du choc et du sentiment d’atteinte à la dignité du défunt
L’apport jurisprudentiel
- La proportionnalité de la sanction : un défaut partiel n’emporte pas résolution totale du contrat
- L’application de l’article 1147 (ancien) du code civil : responsabilité contractuelle pour inexécution partielle
- La double réparation : préjudice matériel (remplacement) et préjudice moral (atteinte au respect dû au défunt)
- La proposition de remplacement : n’exonère pas totalement mais limite le préjudice
- Le régime contractuel : la relation entre famille et opérateur funéraire relève du droit des contrats
Décision commentée: CA Paris, 24 novembre 2016, n° 14/16814
Ces jurisprudences témoignent de la difficulté pour le juge de trancher des conflits où s’entremêlent droit, émotion et divisions familiales, tout en préservant le principe cardinal du respect de la volonté du défunt et de la dignité due aux morts.