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Mise en demeure d’un établissement privé hors contrat et des parents d’élèves

Le 2 avril 2021, le Conseil d’État a rendu une décision importante pour le contentieux du droit de l’éducation, dans un litige opposant un établissement d’enseignement privé hors contrat au ministère de l’Éducation nationale.

En l’espèce, après que plusieurs contrôles des autorités académiques de Haute-Garonne aient révélé des carences dans l’établissement en question en matière d’instruction, les autorités ont mis en demeure les parents d’élèves de les inscrire dans une autre école afin de respecter la législation concernant la scolarisation obligatoire.

En appel, le juge administratif avait fait droit aux demandes des parents, en annulant ces mises en demeure, arguant que l’infraction pénale n’était pas caractérisée, se fondant sur le jugement pénal ayant reconnu que la procédure comportait une irrégularité de procédure et qu’elle ne pouvait prospérer sur le terrain pénal.

En cassation, le Conseil d’État a censuré la cour administrative d’appel, estimant qu’elle avait commis une erreur de droit en annulant la mise en demeure des parents d’élèves au seul motif qu’il n’y avait pas eu de caractérisation de faute pénale. Selon la haute juridiction, la mise en demeure n’est pas subordonnée à l’engagement de poursuites pénales ultérieures ou à leur succès.

En effet, il estime que l’autorité de la chose jugée au pénal ne lie ni l’administration ni le juge administratif en ce qui concerne les motifs d’un jugement de relaxe, laquelle reste saisie de son pouvoir d’appréciation :

« La légalité de cette mise en demeure adressée aux parents des élèves n’est ni conditionnée à l’engagement ultérieur par le procureur de la République de poursuites pénales sur le fondement des dispositions citées au point 3 de l’article 227-17-1 du code pénal, ni fondée sur la seule circonstance que le non-respect par le directeur de l’établissement des obligations imposées par la mise en demeure, qui lui avait été antérieurement adressée, serait constitutif d’une infraction pénale. Par suite, en se fondant exclusivement, pour annuler la mise en demeure adressée aux parents des élèves, sur l’arrêt de la cour d’appel de Toulouse du 20 décembre 2018 renvoyant des fins de la poursuite M. C… et l’association « Les Enfants de demain », respectivement directeur et gérant de l’établissement, au motif que l’infraction réprimée par l’article 227-17-1 du code pénal n’était pas caractérisée, la cour a commis une erreur de droit. »

Ainsi, un établissement privé hors contrat ayant obtenu une relaxe pénale, ou une absence de poursuites, peut tout de même se voir atteint par la mise en demeure rectorale et, par voie de conséquence, les parents des enfants qui y sont scolarisés, peuvent également être mis en demeure d’inscrire leurs enfants dans un autre établissement.

Conseil d’État, 2 avril 2021, n° 434919