Harcèlement scolaire et situation propre
Très récemment, le tribunal administratif de Grenoble a eu l’occasion de prononcer une nouvelle suspension d’une décision de refus d’autorisation d’instruction en famille.
Cette décision vient une nouvelle fois illustrer l’appréciation du motif 4 de la « situation propre à l’enfant » et fait le lien avec le motif lié au harcèlement scolaire, hors des quatre motifs traditionnels. En effet, d’ordinaire, en cas d’instruction en famille motivée par une situation de harcèlement scolaire, la demande doit d’abord être portée devant le directeur de l’école, avant d’être étudiée par le Rectorat. Cela induit un temps de réponse relativement long et peu protecteur de la sécurité de l’enfant.
Dans cette affaire, le juge a admis que les faits de harcèlements passés, de nature à laisser craindre une réitération en l’espèce, justifiaient notamment la situation propre à l’enfant justifiant le choix d’une instruction en famille. S’il est logique qu’une telle situation soit prise en compte pour justifier d’une situation propre, il est à noter que le juge admet l’incorporation dans le motif général et n’exige pas l’introduction de la procédure spécifique :
« Il résulte de l’instruction que depuis le 2 septembre 2024, A F est scolarisée en classe de sixième au collège Louis Lumière à Echirolles où des faits de harcèlements, matérialisés par des bousculades et des propos dénigrants, qui avaient justifiés son instruction en famille en classe de CM1 et CM2, se reproduisent du fait de la présence de deux élèves déjà scolarisés avec A en classe de CE1 et CE2 au sein du groupe scolaire Dolto. Si Mme C justifie avoir saisi, dès le 6 septembre 2024, la conseillère principale d’éducation sur ces faits et avoir demandé un changement de classe, il lui a été répondu qu’aucun changement n’était possible compte tenu de la saturation des classes, alors qu’il ressort des données librement accessibles sur le site de l’académie de Grenoble qu’il existe dans cet établissement cinq classes de sixième. Dans ces conditions, alors que l’instruction en famille initiée en 2022 a été jugée satisfaisante par l’inspecteur de l’éducation nationale, la requérante justifie de l’existence d’une atteinte grave et immédiate portée à la situation de son enfant par l’exécution de la décision contestée. Ainsi, la condition relative à l’urgence exigée à l’article L. 521-1 du code de justice administrative doit, en l’espèce, être regardée comme remplie » (TA Grenoble, 19 septembre 2024, n° 2406567).
En outre, le rejet du RAPO était daté du 13 juin, pour une requête déposée le 30 août ; si les délais de notification expliquent la recevabilité de la requête, cela témoigne d’une approche souple de l’urgence puisque le délai d’introduction de la requête n’a pas été opposé aux requérants pour écarter l’urgence. Cela tient cependant probablement à la survenance d’éléments postérieures à la décision venant rendre impératif l’instruction en famille.
C’est donc une victoire importante, dans un tribunal qui a beaucoup varié dans ses approches sur le sujet.
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