Transfert de la licence de débit de boissons: illégalité du refus de la préfecture en l’absence de preuve de troubles à l’ordre public
Saisi par un requérant qui avait vu l’ouverture de son débit de boissons refusé par la Préfecture, le tribunal administratif de Lyon a suspendu la décision aux termes d’une ordonnance de référé intéressante.
En effet, en l’espèce, le juge administratif a été amené à apprécier l’argument souvent mis en avant par les Préfectures, tiré de ce que l’ouverture pourrait générer une accentuation de troubles à l’ordre public.
Il a tout d’abord retenu qu’il existait bien une urgence pour le débit de boissons à voir un juge se prononcer en retenant que :
« En l’espèce, alors que l’établissement Le Rhum-Riz exerce sur le territoire de la commune de Roanne, une activité de restauration et de débit de boissons, l’arrêté contesté a pour effet de lui interdire toute vente de boissons alcoolisées. Il résulte de l’instruction, et notamment du bilan prévisionnel et du document d’analyse de l’activité permettant de déterminer la faisabilité économique du projet que l’activité de bar pour laquelle la licence IV avait été notamment sollicitée représente 40 % du chiffre d’affaires escompté, que le chiffre d’affaires de l’établissement a déjà accusé au cours des mois d’octobre, novembre et décembre 2023, ainsi que cela ressort des relevés de compte bancaire produits, une baisse de plus de 58 % entre le chiffre d’affaires prévisible et celui réalisé, ne laissant à M. A et à sa société, aucun bénéfice au cours de ce dernier mois, alors par ailleurs qu’il lui incombe de faire face au paiement d’importantes charges fixes et au remboursement d’investissements, dont il justifie par les pièces versées au débat, qu’il ne pourrait, en tout état de cause, les résilier sans que soit accordée une compensation indemnitaire. Par suite, compte tenu de l’incidence immédiate de la décision attaquée sur son activité et alors, d’une part, que cette diminution de chiffre d’affaires est susceptible, à court terme, de mettre en péril sa situation financière et d’autre part, qu’il ne résulte pas de l’instruction que les conditions de fonctionnement de l’établissement soient à l’origine des troubles à l’ordre public visés dans ladite décision, la société requérante doit être regardée comme justifiant suffisamment d’une situation d’urgence. ».
Ensuite, s’agissant du doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée, le tribunal a retenu une erreur de droit dans l’application des dispositions de l’article L. 3332-11 du code de la santé publique et une erreur de qualification juridique des faits en l’absence d’éléments de preuve tendant à accréditer la thèse de la Préfecture selon laquelle l’ouverture du débit de boissons serait de nature à accentuer les troubles à l’ordre public.
Il a donc suspendu le refus d’ouverture et enjoint à la Préfecture de délivrer le récépissé.
TA Lyon, 25 janv. 2024, n° 2400186.