Le maire ne peut pas imposer l’uniformité esthétique au cimetière
Une décision récente du tribunal administratif de Versailles rappelle les limites des pouvoirs du maire en matière de police des cimetières
En mars 2022, une habitante de Gazeran sollicite auprès de son maire l’attribution d’une concession de cavurne (monument funéraire destiné à accueillir une urne cinéraire) dans le cimetière communal. Sa demande comporte une particularité : elle souhaite ne pas être contrainte d’installer la plaque funéraire standardisée que la commune impose sur tous les cavurnes du cimetière.
Face au silence de l’administration, elle saisit le tribunal administratif de Versailles pour contester ce refus implicite.
Par un jugement du 23 mai 2025 (n° 2205359), le tribunal administratif de Versailles a donné raison à la requérante et annulé la décision de refus du maire. L’occasion de faire un point sur la situation du Maire en matière de police funéraire.
Les pouvoirs limités du maire en matière d’esthétique funéraire
Le tribunal rappelle un principe essentiel : le maire ne dispose pas d’un pouvoir général de police de l’esthétique des cimetières lui permettant d’imposer l’uniformité des monuments funéraires.
La législation en vigueur (articles L. 2223-12 et L. 2223-13 du code général des collectivités territoriales) prévoit que :
- Toute personne peut librement faire placer sur une sépulture une pierre sépulcrale ou un signe indicatif,
- Les bénéficiaires d’une concession peuvent construire des monuments funéraires,
- Le maire peut uniquement fixer des dimensions maximales des monuments (article L. 2223-12-1).
En imposant une plaque identique sur tous les caveaux, la commune a excédé ses pouvoirs de police des cimetières. Cette exigence d’uniformité esthétique ne repose sur aucun fondement légal.
Cependant, il existe une réserve importante : le maintien du bon ordre et de la décence. En effet, le tribunal précise toutefois que cette liberté de personnalisation s’exerce « sous réserve du maintien du bon ordre et de la décence » des lieux. Le maire conserve donc un pouvoir de contrôle pour prévenir les monuments contraires à l’ordre public ou à la décence.
Les conséquences pratiques de cette décision
Pour les familles
Cette décision reconnaît le droit à la personnalisation des sépultures dans le respect de la mémoire des défunts. Les familles peuvent :
- Choisir librement le type de monument funéraire (dans les limites dimensionnelles fixées),
- Personnaliser les plaques, gravures et ornements,
- Refuser l’uniformisation esthétique imposée par certaines communes.
Pour les communes
Les municipalités doivent revoir leurs pratiques si elles imposent :
- Des modèles standardisés de monuments,
- Des plaques funéraires identiques,
- Une uniformité esthétique au-delà des simples limitations de dimensions.
Les règlements de cimetière trop restrictifs s’exposent à des recours contentieux.
Notre cabinet intervient régulièrement en droit funéraire et droit des collectivités territoriales. Nous défendons vos droits face aux décisions administratives illégales et vous accompagnons dans vos démarches; en cas de difficulté, n’hésitez pas à prendre rendez-vous.