
Motif 1 (IEF) : Il n’y a pas d’exigence de disposer d’une notification MDPH !
Le juge des référés de Pau a rendu une décision intéressante la semaine dernière sur un dossier d’instruction en famille.
Saisi par une famille dont la demande fondée sur l’article L. 131-5, 1° du code de l’éducation avait été rejetée par le Rectorat, le tribunal administratif de Pau a reconnu, d’une part, l’urgence de la situation, et, d’autre part, le doute sérieux sur la légalité du refus opposé.
Concernant l’urgence, il a rappelé la position traditionnelle du juge du référé pour retenir l’urgence, à savoir comparer l’urgence particulière des intérêts du requérant à l’urgence générale de l’intérêt public. S’agissant de l’état de santé d’un enfant, qui n’enlève rien à l’intérêt public, le juge a logiquement considéré que :
« En l’espèce, la décision en litige a pour effet de contraindre la requérante à inscrire son fils dans un établissement scolaire en capacité de l’accueillir, dans un très bref délai. En outre, alors qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que des intérêts publics s’y opposent, elle est de nature à avoir des conséquences importantes sur l’équilibre de l’enfant et préjudiciables à l’enfant, dans l’hypothèse où sa scolarisation ne serait pas conforme à son état de santé. La condition d’urgence prévue par les dispositions citées au point 3 doit, dans ces conditions, être regardée comme remplie. ».
Il a ensuite analysé les moyens afférents au doute sérieux sur la légalité et a considéré, après avoir rappelé les dispositions applicables du code de l’éducation et l’attendu de principe du Conseil d’Etat que :
Il résulte de l’instruction, notamment de la décision attaquée du 15 juillet 2025, que le recours administratif préalable obligatoire de MmeB a été rejeté aux motifs que la famille n’apporte pas d’éléments plus explicites permettant d’attester d’une situation de handicap reconnue par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées. Toutefois, il ne ressort pas des dispositions citées au point 6 qu’une attestation de handicap reconnue par cette commission soit obligatoire pour la délivrance de l’autorisation d’instruction dans la famille.
L’administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l’excès de pouvoir que la décision dont l’annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l’auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d’apprécier s’il résulte de l’instruction que l’administration aurait pris la même décision si elle s’était fondée initialement sur ce motif. Dans l’affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu’elle ne prive pas le requérant d’une garantie procédurale liée au motif substitué.
L’administration fait valoir en défense un nouveau motif tiré, d’une part, de ce que l’état de santé de l’enfant A ne rend pas impossible sa scolarisation dans un établissement d’enseignement public ou privé et, d’autre part, que l’instruction chez sa maman n’est pas la plus conforme à son intérêt. Toutefois, il résulte des éléments portés à la connaissance du juge des référés, en particulier du certificat médical d’un psychiatre établi le 20 juillet 2025, soit postérieurement à la date de la décision attaquée mais révélant une situation de fait antérieure, que l’état de santé du fils de MmeB nécessite sur le plan pédopsychiatrie de continuer à être dans l’instruction en famille et que toute intégration à l’institution scolaire sera de nature à aggraver son tableau marqué par un syndrome anxieux généralisé par des peurs exprimées. Par ailleurs, il résulte des différents rapports de contrôle de l’instruction en famille, portés à la connaissance du juge des référés, que le bilan de l’instruction dans la famille pour le jeune A est positif. De plus, il ressort de l’attestation du psychologue qui suit le jeune A, qui n’a pas été scolarisé dans un établissement d’enseignement public ou privé depuis la petite section de maternelle, que, depuis qu’il a appris son retour dans un tel établissement en classe de CM2 à la rentrée scolaire 2025-2026, il « s’est de nouveau montré très agité et moins accessible, faisant part de son inquiétude de retourner en classe car cela lui rappelait des souvenirs difficiles de son expérience à l’école ayant pu engendrer des signes cliniques d’angoisse massive. ». Dans ces conditions, en l’état de l’instruction, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 1° de l’article L. 131-5 du code de l’éducation, est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision en litige».
On le voit, une fois encore, le Rectorat a tout tenté pour s’opposer à la demande.
Après avoir exigé une notification MDPH pour faire droit à une demande motif 1, le Rectorat, qui se voyait déjugé sur ce point, a réalisé une substitution de motif.
Il a ainsi tenté de soutenir que la scolarisation était possible – alors même qu’il n’y a pas de notification MDPH et donc, pas de réels aménagements possibles à très brefs délais – pour un enfant atteint de troubles très important et n’ayant pas été scolarisé depuis 7 ans.
Le juge, s’appuyant sur les certificats produits, a donc censuré le Rectorat et rétabli l’intérêt de l’enfant en considérant que son intérêt, au regard de son état de santé, justifiait qu’il soit autorisé à recevoir l’instruction en famille.
Si vous rencontrez une difficulté en droit de l’instruction en famille, n’hésitez pas à contacter nos avocats en IEF.