Le droit à l’accompagnement par une AESH : une fin d’année révélatrice
La dernière semaine de novembre 2025 aura été particulièrement dense pour le contentieux de l’accompagnement scolaire des élèves en situation de handicap. Les tribunaux administratifs de Rennes, Lyon et Melun ont successivement prononcé des ordonnances en référé sanctionnant l’absence de mise en œuvre effective des décisions des MDPH. Si ces décisions peuvent paraître banales au regard de la jurisprudence désormais consolidée en la matière, elles révèlent l’ampleur d’une défaillance systémique.
Un contentieux qui s’installe dans la durée
Ces nouvelles ordonnances s’inscrivent dans un contentieux parfaitement rodé. La mécanique procédurale est désormais bien connue : notification CDAPH non exécutée, demande restée sans réponse, référé suspension fondé sur l’article L. 521-1 du CJA. Les juges des référés n’hésitent plus à suspendre les décisions implicites de refus et à enjoindre aux rectorats de mettre en œuvre les accompagnements dans des délais de deux mois.
Le tribunal administratif de Rennes illustre cette dynamique avec trois ordonnances rendues entre le 28 novembre et le 3 décembre 2025. Dans chaque affaire, le même constat : des enfants présentant des troubles du spectre autistique, des décisions MDPH octroyant des AESH à temps complet ou partiel, et une absence totale ou très partielle d’accompagnement effectif depuis la rentrée scolaire.
L’argument budgétaire ne passe plus
Face à ces situations, l’administration invoque systématiquement les difficultés de recrutement et la pénurie de candidatures. Le tribunal administratif de Melun répond sans ambiguïté : l’État « ne saurait utilement se prévaloir de difficultés de recrutement ou de l’insuffisance de places en milieu scolaire adaptées« . Plus frappant encore, le juge relève l’absence de tout processus de recrutement anticipé avant la rentrée 2025 dans le Val-de-Marne.
Cette jurisprudence, constante depuis plusieurs années, reflète une position de principe : le droit à l’éducation des enfants handicapés ne peut être subordonné aux contraintes budgétaires ou organisationnelles de l’administration. Les articles L. 111-1 et L. 112-1 du code de l’éducation, combinés aux dispositions du code de l’action sociale et des familles, imposent à l’État une obligation de résultat. Surtout, si les derniers temps apparaissent proprices à ces recours, le Conseil d’Etat avait, il y a désormais quelques années, pris une jurisprudence très conciliante pour l’administration. Il y a donc une évolution dans l’appréciation qu’ont les juges des carrences de l’administration.
La scolarisation « effective » ne suffit pas
Un argument récurrent des rectorats mérite d’être relevé : affirmer que l’enfant bénéficie d’une « scolarisation effective », même si elle « n’est pas optimale ». Les juges balaient cet argument. Dans l’affaire jugée par le TA de Rennes le 3 décembre 2025, l’enfant ne disposait que de 16 heures d’accompagnement mutualisé au lieu des 24 heures individuelles prescrites. Pire, elle n’était pas accompagnée pour ses besoins élémentaires et s’était retrouvée « à plusieurs reprises, sale en fin de journée« .
Cette réalité illustre l’écart entre scolarisation formelle et scolarisation adaptée. Le juge ne se contente plus de constater qu’un enfant est physiquement présent dans une classe. Il vérifie concrètement si l’accompagnement permet de compenser le handicap et de garantir des apprentissages effectifs.
Une jurisprudence stable, des carences persistantes
Ce qui frappe dans cette série de décisions, c’est leur caractère répétitif. Les principes juridiques sont établis, la méthodologie contentieuse est éprouvée, les condamnations s’accumulent. Pourtant, la situation ne s’améliore pas structurellement. Les familles continuent d’attendre des mois avant d’obtenir l’accompagnement notifié, épuisant leurs recours amiables avant de saisir le juge.
Le contentieux AESH révèle ainsi un paradoxe : une jurisprudence protectrice qui contraste avec une mise en œuvre défaillante des politiques publiques. Entre les décisions MDPH et leur exécution effective, les familles doivent trop souvent passer par la case tribunal.
Face à ces carences, l’accompagnement juridique des familles devient indispensable. Le référé suspension permet d’obtenir des résultats rapides – sous quinze jours après l’audience – et les taux de succès sont élevés dès lors que la décision MDPH n’est manifestement pas exécutée.
Notre cabinet accompagne régulièrement des familles dans ces démarches. Au-delà du contentieux, nous travaillons également sur les recours amiables et la médiation avec les services académiques. L’objectif reste de faire valoir les droits reconnus par la MDPH dans les meilleurs délais.
Les décisions de novembre 2025 ne sont malheureusement qu’un nouveau chapitre d’une histoire qui se poursuit. Elles rappellent que le droit à l’éducation des enfants handicapés ne se négocie pas et que le juge administratif reste le garant ultime de son effectivité.
N’hésitez pas à nous contacter pour toute question relative à la mise en œuvre des décisions MDPH !
Nausica Avocats
12 Rue des Eaux, 75016 Paris
09 78 80 62 27
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