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Concours médecine : Légalité et indemnisation

Récemment, le Tribunal administratif de Rennes a condamné une Université à indemniser un étudiant évincé du concours de PACE (TA Rennes, 3e ch., 13 févr. 2025, n° 2203019). L’occasion de proposer un point jurisprudentiel.

Il s’agissait d’un étudiant ajourné au concours d’accès aux études de Médecine qui contestait la régularité -déjà censurée par le Conseil d’Etat – des modalités du concours.

Le juge, qui a retenu l’illégalité de l’organisation du concours a cependant modulé les effets de sa décision dans le temps, eu égard aux conséquences d’une annulation du concours de médecine de 2022.

En revanche, sur le terrain indemnitaire, le juge a reconnu le préjudice subi par l’étudiant du fait de l’illégalité du concours et a admis son indemnisation.

Une décision dense qui rappelle tant les difficultés auxquelles ont donné lieu les réformes des études de santé que la possibilité de mêler des conclusions indemnitaires et de pure légalité.

Dans un premier temps, le jugement retient naturellement qu’un concours étant global, il ne peut être contesté partiellement. Le requérant doit attaquer la délibération dans son ensemble, non uniquement en tant qu’elle le concerne.

Ensuite, il considère s’agissant de la légalité de l’organisation du concours que :

« Ainsi que l’a jugé le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, par une décision du 29 décembre 2023 n° 469479, alors que l’article L. 631-1 du code de l’éducation a renvoyé à un décret en Conseil d’Etat le soin de définir les conditions et modalités d’admission en deuxième année, les dispositions de l’article R. 631-1-2 du code de l’éducation confient à chaque université le soin de déterminer pour chaque parcours ou groupe de parcours de formation antérieurs « les modalités selon lesquelles les résultats aux deux groupes d’épreuves sont pris en compte pour établir les listes d’admission », soit notamment la pondération respective de chaque groupe d’épreuves, sans encadrer aucunement cette délégation. Ces dispositions de l’article R. 631-1-2 du code de l’éducation sont donc entachées d’incompétence ainsi que, par voie de conséquence, celles de la deuxième phrase du III de l’article 12 de l’arrêté du 4 novembre 2019 qui en réitèrent les règles. Il en résulte que M. A est fondé à demander l’annulation de la délibération attaquée, par laquelle le jury de la faculté de médecine de l’UBO a fait application de modalités de sélection adoptées en vertu de ces dispositions illégales. ».

 

Le Tribunal fait donc droit au moyen tiré de l’exception d’illégalité des modalités d’élaboration des listes d’admission en deuxième année, du fait de l’illégalité du décret qui en était le support. Les modalités se trouvent donc privées de base légale et apparaissent donc illégale.

Cependant, eu égard à la circonstance qu’un concours concerne tous les candidats et que les lauréats du concours litigieux sont en quatrième année à la date du jugement, le Tribunal a retenu que :

« Eu égard aux conséquences manifestement excessives qui résulteraient de l’annulation rétroactive de la délibération litigieuse, qui remettrait en cause toutes les décisions notifiées aux étudiants admis en deuxième année de médecine au titre de l’année universitaire 2021-2022, il y a lieu de n’en prononcer l’annulation qu’à compter de la date de mise à disposition du présent jugement et de réputer définitifs les effets antérieurs à cette annulation en ce qui concerne les étudiant admis ».

Du fait de la disparition du décret de des nouvelles modalités d’examens des résultats, le Tribunal ne peut opérer de comparaisons utiles en vue de faire droit à la demande de réexamen, et d’admission, de l’étudiant en deuxième année pour la rentrée prochaine.

Cependant, toute illégalité de l’administration étant une faute, le juge a dû apprécier les conséquences de cette dernière au regard des préjudices invoqués par le requérant :

« M. A, dont les résultats ont été appréciés par deux fois sur le fondement de modalités de sélection irrégulières, a subi un préjudice moral qui peut être évalué à la somme de 800 euros.

En revanche, eu égard à la portée de l’illégalité dont sont entachées les délibérations litigieuses, qui a affecté de la même façon tous les candidats, aux rangs de classement qui ont été attribués à M. A en 2021 (77ème sur 96 candidats pour 46 places) et en 2022 (110ème sur 138 candidats pour 76 places), et à l’absence de tout début de démonstration de sa part de ce que la fixation d’autres modalités de sélection des candidats, reposant sur l’attribution de coefficients différents pour chaque groupe d’épreuves, lui aurait permis d’être admis avec les mêmes notes, il ne résulte pas de l’instruction que M. A aurait perdu une chance sérieuse d’être admis dans l’une des formations auxquelles il souhaitait s’inscrire. Le requérant n’est donc pas fondé à demander la réparation du préjudice financier et des troubles dans les conditions d’existence qu’il estime avoir supportés en raison de sa non-admission dans ces formations. ».

Le tribunal rappelle la nécessité de démontrer concrètement la perte de chances, la seule illégalité ne suffisant pas à cet égard.

Une décision dense juridiquement qui traite tant de la problématique liée à la réforme des études de santé qu’aux pouvoirs de juge en matière d’annulation et de modulation des effets, tout en rappelant la possibilité d’entremêler Recours en excès de pouvoir et Recours de plein contentieux.

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