Situation propre et continuité de l’instruction
Par une décision récente, le Tribunal administratif de Limoges a pu reconnaître qu’un enfant ayant bénéficié, lors des deux années précédentes, d’une autorisation d’instruction en famille devait se voir délivrer, sauf circonstances nouvelles le justifiant, une nouvelle autorisation d’instruction en famille.
En effet, sauf à se retrancher derrière une appréciation erratique, les mêmes causes doivent produire les mêmes effets. C’est ce qu’a rappelé le juge administratif récemment :
« D’une part, il ressort des pièces du dossier, notamment des certificats médicaux établis par un médecin et un psychologue, qu’Augustin souffre d’hypersensibilité ; que de cet état résulte une grande anxiété et des crises d’angoisse dès lors que l’enfant se trouve au sein d’un milieu contraint. D’autre part, il résulte de l’instruction que l’enfant des requérants a bénéficié d’une autorisation de recevoir l’instruction de la famille à compter de l’année scolaire 2022-2023, renouvelée pour l’année 2023-2024. Ces autorisations ont toutes été délivrées pour le motif visé par le 4° de l’article L. 131-5 du code de l’éducation, soit l’existence d’une situation propre à l’enfant motivant le projet éducatif. Par ailleurs, les enquêtes et bilans réalisés suite à la mise en œuvre de cette instruction en famille sont positifs. Alors que la rectrice de l’académie de Limoges avait reconnu l’existence d’une telle situation pour cet enfant et que les requérants ont produit, à l’appui de leur demande de renouvellement de cette autorisation pour l’année scolaire 2024-2025, des éléments relatifs à la situation propre à leur enfant, la commission académique n’a toutefois fait état d’aucun changement dans la situation de ceux-ci de nature à justifier l’évolution de l’appréciation portée sur ce point. La rectrice de l’académie de Limoges n’a pas davantage apporté, en défense, de tels éléments. Ainsi, en l’état de l’instruction, le moyen tiré de ce que le rectorat de Limoges a commis une erreur d’appréciation est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision » (TA Limoges, 25 sept. 2024, n° 2401667).
Cette décision vient s’inscrire dans une lignée prometteuse mais rompue du début de l’été 2023 où notamment Rouen avait pris position en faveur de la continuité du mode d’instruction. Précisons, qu’en l’espèce, l’instruction n’était pas circonscrite à un même cycle; il y a donc une approche large de la discontinuité du mode d’instruction.
Cette approche est d’ailleurs confirmée dans les motifs relatifs à l’urgence puisque le juge retient que :
« Pour justifier de l’urgence, Mme F et M. B font valoir qu’ils devront accomplir des diligences dans les jours à venir s’ils doivent inscrire leur enfant dans un établissement scolaire, que cette décision aura pour conséquence la rupture pédagogique alors qu’A a commencé les apprentissages de cycle 2 avec une méthode spécifique et, enfin, que l’arrêt brutal de l’instruction en famille après deux autorisations délivrées les années précédentes aura des répercussions sur l’état psychologique de leur fils.
En l’espèce, la décision en litige a pour effet de contraindre les requérants à inscrire leur enfant dans un établissement scolaire en capacité de les accueillir, dans un très bref délai, eu égard au fait que la rentrée scolaire a eu lieu il y a plusieurs jours. En outre, cette décision est de nature à modifier brusquement, et de manière importante, l’organisation de cette famille et les habitudes de cet enfant, E étant instruit en famille depuis l’année scolaire 2021/2022. Ainsi, la condition d’urgence doit être regardée comme remplie » (TA Limoges, préc.).
C’est une nouvelle pierre à l’édifice en constante évolution de la jurisprudence attachée au nouveau régime de l’instruction en famille. Si vous rencontre une difficulté en la matière, n’hésitez pas à nous contacter.